Risque client : Comment évaluer  la santé financière d’une entreprise ?

Fiche pratique 30/07/2020

Pour évaluer la santé financière d’une entreprise, l’objectif est de faire parler les chiffres et établir un diagnostic sur la solvabilité de votre client.

L’évaluation de la santé financière d’une entreprise doit être orientée vers le court terme car vous avez besoin de déterminer si votre client sera solvable dans 6 mois ou un an.

Quelles sont les limites d’une analyse de la santé financière ?

Soulignons, dès à présent, les limites de l’évaluation de la santé financière en ce qu’elle travaille sur des comptes annuels qui ne sont disponibles au plus tôt que 7 à 8 mois après la date de clôture, la situation a pu beaucoup évoluer entre temps.

Evaluer la santé financière n’est donc pas suffisant mais demeure nécessaire. Elle a pour objectif de répondre à 4 grands types de questions :

 Quelle est l’origine des financements de l’entreprise ? Capitaux propres, comptes courants d’actionnaires, dettes bancaires, emprunts obligataires, dettes à court ou long terme ? C’est l’analyse du Bilan (structure financière).

 L’activité de l’entreprise est-elle en croissance ou en décroissance ? Dégage-t-elle des profits ou des pertes ? C’est l’analyse du Compte de Résultat.

 A quels niveaux se situent les foyers de pertes et de bénéfices ? C’est l’analyse des Soldes Intermédiaires de Gestion.

 Quelle est l’influence de l’exploitation sur la structure financière ? En effet, vous êtes davantage préoccupé à évaluer la capacité de survie de votre client à court terme que par sa capacité à générer du résultat, donc le Compte de Résultat vous intéresse surtout dans la mesure où il peut influer sur la structure financière.

1. Evaluer la santé financière en analysant la structure financière (Bilan)

1.1. LE FONDS DE ROULEMENT (FR)

FR = Ressources stables (capitaux propres + dettes financières à moyen et long terme) – emplois stables (actifs immobilisés)

L’analyse du FR doit permettre de répondre à plusieurs questions.

→ Les financements à long terme de l’entreprise sont-ils constitués de capitaux propres ou de dettes ?

Pour cela, il est généralement préconisé les ratios suivants :

  • Capitaux propres / total passif > 20%
  • Capitaux propres / ressources stables > 60%

 Les financements à long terme sont-ils suffisants pour financer l’actif immobilisé ?

La grande règle de l’orthodoxie financière veut que des emplois stables soient intégralement financés par des ressources stables. Des emplois courts peuvent être financés par des ressources stables mais l’inverse est dangereux.

  • Si le FR est positif, cela signifie que les ressources stables financent l’intégralité des emplois stables et qu’un excédent de ressources stables est disponible pour financer des emplois courts.
  • Si le FR est négatif, cela signifie que les ressources stables sont insuffisantes et que l’entreprise doit faire appel à des ressources à court terme pour financer une partie des emplois stables.

 Les bénéfices éventuels de l’entreprise sont-ils réinjectés dans les réserves de l’entreprise ou distribués ?

La distribution ou non des résultats témoigne du choix de gestion et de l’implication des dirigeants et actionnaires dans la pérennité de leur entreprise : entre ceux qui réinvestissent les bénéfices et ceux plus motivés à les distribuer.

  • A noter : on peut assimiler les comptes courants d’actionnaires bloqués ou présents dans l’entreprise depuis plusieurs années à des fonds propres.

ELEMENTS CLÉS

L’analyse de la santé financière par le bilan doit répondre aux questions suivantes :

  • La société est-elle suffisamment capitalisée ?
  • L’endettement est-il excessif ou supportable ?
  • L’exploitation dégage-t-elle une ressource ou un besoin en fonds de roulement ?
  • Si elle dégage un BFR, est-il financé par le FR ou une trésorerie négative ?
  • Si elle dégage une ressource en fonds de roulement, finance-t-elle les actifs stables ou la trésorerie ?

1.2. LE BESOIN EN FONDS DE ROULEMENT (BFR)

BFR = emplois circulants (stocks, créances clients…) – ressources circulantes (dettes fournisseurs, dettes fiscales et sociales…)

Le décalage dans le temps entre les achats et les ventes entraine la constitution de stocks. Le décalage dans le temps entre la facturation clients et les encaissements entraine la constitution de créances clients. Ces décalages créent un besoin en fonds de roulement appelé aussi « besoin de financement ». Autrement dit, le BFR, c’est l’argent dehors. Il est atténué par le décalage, à l’inverse, entre la facturation des fournisseurs et les décaissements faits par l’entreprise.

  • A noter : certains milieux financiers préconisent que le FR couvre au moins 60% du BFR.

Le BFR augmente si le chiffre d’affaires progresse car il y aura davantage de créances clients et de stocks et inversement si l’activité décroît. Néanmoins, il se peut qu’il croisse plus vite que le CA en cas de croissance mal maîtrisée. Par exemple, s’il y a une moins bonne rotation des stocks ou s’il y a une dégradation des délais de paiement (allongement de la durée du crédit clients et/ou inversement raccourcissement du crédit fournisseur).

  • Un DSO (durée moyenne du crédit client) > 90 jours constitue une alerte et peut signifier que l’entreprise à des difficultés à encaisser ses factures, soit des délais de paiement longs
  • Une durée moyenne du crédit fournisseur > 90 jours peut signifier que l’entreprise a des difficultés à payer ses fournisseurs.

 Si le BFR augmente démesurément, l’entreprise pour rester solvable devra augmenter son FR en augmentant ses fonds propres et/ou ses emprunts à long terme. Mais si les banquiers ou actionnaires ne veulent pas apporter de financements supplémentaires, l’entreprise court au dépôt de bilan.

Si le BFR est négatif, cela veut dire que l’exploitation permet de dégager des ressources. C’est le cas notamment dans la grande distribution qui se fait régler au comptant alors qu’elle règle ses fournisseurs à crédit, qui se traduit par un volant non négligeable de trésorerie.

1.3. LA SITUATION NETTE DE TRESORERIE (SNT)

SNT = trésorerie de l’Actif du Bilan (Valeurs Mobilières de Placement et disponibilités) – Trésorerie du Passif du Bilan (découvert bancaire, concours bancaires à court terme)

Elle résulte de la différence entre le fonds de roulement et le besoin en fonds de roulement avec la relation fondamentale : FR = BFR + SNT

La SNT peut être positive, nulle, ou négative. La situation idéale serait une situation nette de trésorerie nulle, quand le FR finance le BFR à l’euro près.

  • Dans la pratique, il est préférable que la trésorerie soit positive de 1 voire 2 mois de chiffre d’affaires, car l’entreprise dispose ainsi d’un matelas de sécurité.
  • Une entreprise peut fonctionner avec une situation nette de trésorerie négative, on préconise une trésorerie négative de 2 mois de chiffre d’affaires maximum.

INFORMATIONS CLÉS

  • L’analyse de la santé financière de l’entreprise doit se faire dans le temps (sur les 3 dernières années) et dans l’espace (comparaison sectorielle avec les autres entreprises du même secteur d’activité).
  • Le contexte Groupe est à prendre en compte. Une filiale en difficulté pourra être éligible à une ligne de crédit si le groupe est solide. A l’inverse, une filiale ayant de bons résultats intrinsèques représentera un risque élevé si son Groupe est en difficulté.
  • Si la société est située à l’étranger, il faudra prendre en compte le risque pays d’une part et faire appel, le cas échéant, à un acteur du renseignement spécialisé à l’export d’autre part.

2. Evaluer la santé financière en analysant le compte de résultat et les Soldes intermédiaires de Gestion (SIG)

La deuxième étape pour évaluer la santé financière est d’observer la capacité de votre client à développer son chiffre d’affaires et à dégager des résultats.

2.1. ANALYSE DES FOYERS DE RENTABILITE ET DE PERTE

Vous analyserez plus en détail à quel niveau du Compte de Résultat se situent les foyers de perte et de rentabilité en observant la formation d’indicateurs clés tels que la Valeur Ajoutée, l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE), le Résultat Courant Avant Impôts (RCAI), le Résultat Exceptionnel et le Résultat Net.

Il convient d’examiner les postes les plus lourds en les comparant aux autres entreprises du même secteur d’activité, notamment les charges de personnel et les frais financiers. A ce titre, les ratios suivants sont préconisés :

  • Charges de personnel / valeur ajoutée < 60% (à moduler en fonction du secteur d’activité, donc comparer avec la médiane du secteur disponible dans les bases de données).
  • Frais financiers / chiffre d’affaires < 3%
  • Frais financiers / EBE < 30% (80% des dépôts de bilan ont un taux supérieur à 50%).

2.2. ANALYSE DE LA CAPACITÉ D’AUTOFINANCEMENT (CAF)

CAF = Produits encaissables – Charges décaissables

L’étude du Compte de Résultat et des SIG permet de déterminer un autre indicateur fondamental de la santé financière d’une entreprise : la Capacité d’Autofinancement.

La CAF est la trésorerie potentielle dégagée par l’exploitation de l’entreprise prise au sens large (et non au sens restrictif comme dans le calcul de l’EBE), donc on y inclut le financier et l’exceptionnel sauf les comptes liés aux opérations d’investissement.

C’est la trésorerie dont disposerait l’entreprise en fin d’exercice si toutes les charges et tous les produits étaient réglés comptant (hors prix de cession des immobilisations). C’est la ressource interne générée par l’entreprise, elle sert à distribuer des dividendes, à réaliser des investissements, à rembourser les emprunts. Précisément, on calcule à partir de la CAF un autre ratio fondamental de la santé financière d’une entreprise : la capacité de remboursement. Elle se mesure en années et les milieux financiers préconisent le ratio suivant :

  • Capacité de remboursement = dettes financières MLT (Moyen et Long terme) / CAF <4 ans.

L’analyse du Compte de Résultat et des SIG intervient au deuxième plan derrière celle de la structure financière. En effet, pour un crédit-manager dont l’objectif est d’évaluer la pérennité à court terme de son client, cette analyse a essentiellement pour finalité de déterminer si l’exploitation constitue un poids ou un soutien pour la structure financière. Si l’activité dégage des pertes récurrentes, celles-ci pèseront sur la structure financière en amoindrissant les capitaux propres chaque année (report à nouveau débiteur). En revanche, si l’activité dégage des bénéfices qui sont portés en réserves et non pas distribués, ceux-ci viendront renforcer la structure financière.

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